En août 2021, la chaîne de luxe Mandarin Oriental inaugurait à Istanbul son deuxième établissement turc, le Mandarin Oriental Bosphorus, sept ans après son installation dans le pays à Bodrum. Un resort urbain de cent chambres, arrimé à la rive européenne du Bosphore et destiné essentiellement à une clientèle haut de gamme, qui incarne à lui seul l’orientation résolument Luxe du tourisme en Turquie.

Ce phénomène récent, qui concerne déjà 36 % de l’arsenal hôtelier turc, pourrait profiter à l’offre française de décoration premium et luxe qui connaît déjà une implantation réussie sur le marché local. Léa Rodier, chargée d’export Art de vivre au sein de Business France Turquie fait le point sur les opportunités du moment.

 

 

Un marché tiré par les résidences particulières et le tourisme

 

« Pour comprendre le dynamisme actuel en Turquie, il faut analyser les déterminants de la croissance : d’abord une reprise très rapide de la consommation des ménages post-pandémie, avec 9,1 % de hausse en 2021 alimentée par une distribution de crédits dynamique, ainsi qu’un boom dans le secteur de la construction, avec de grands projets d’infrastructures et l’inauguration de nombreux centres commerciaux ». Une équation qui conduit la Turquie à prendre la première place des pays du G20 en matière de croissance – le pays affiche 11 % en 2021 – et à s’imposer comme destination de choix pour les exportateurs de produits de Luxe, peu sensibles aux variations du cours des monnaies.

« Mais derrière ces éléments conjoncturels, c’est surtout la consommation tirée par les classes supérieures qui constitue une opportunité pour l’offre française de décoration », analyse Léa Rodier. En 2021, elles sont en effet 6,6 % à gagner plus de 120 000 TRY par an (soit env. 14 000 USD), sur une population qui compte déjà 83 millions d’habitants, largement urbanisée (23 villes comptent plus d’1 million d’habitants) : autant de foyers qui cherchent à réaménager leurs logements après le confinement, voire même… leur résidence secondaire. Car le marché turc des résidences secondaires, très dynamique sur la côte méditerranéenne et longtemps tourné vers les étrangers (avec un boom dans les années 2014-15), s’accélère désormais côté population locale à la faveur de prix relativement abordables. « Dans ces résidences en bord de mer, le style français est fortement prescripteur et les propriétaires sont avides de produits haut de gamme », confirme Léa Rodier. 

Un marché de la résidence secondaire qui vient compléter celui du tourisme, en pleine premiumisation dans les grandes villes (on recense plus de 500 hôtels quatre et cinq étoiles autour d’Antalya) mais aussi dans des régions plus reculées : « On assiste à la fin de la primauté du all-inclusive des rives méditerranéennes, explique Léa Rodier. Désormais, le pays investit dans des infrastructures de tourisme sur des sites patrimoniaux ou dans des stations thermales ou hivernales – voire même sur le terrain sportif ». Ainsi a-t-on vu 18 circuits de golf fleurir autour de Belek, dans la région d’Antalya – avec un tournoi, le Turkish Airlines Open, pour assurer le rayonnement des infrastructures. Tandis qu’en matière de tourisme géothermal, ce sont 1500 sources que la Turquie met à profit pour se hisser en première place du classement européen des destinations.

« La crise du COVID a forcément fragilisé le secteur dans un pays qui a accueilli 51 millions de touristes en 2019 (6e pays touristique mondial), mais les dégâts ont été limités par la faiblesse relative des confinements et la permanence d’une clientèle du Moyen-Orient et d’Asie centrale : dès 2021, ce sont 30 millions de touristes qui ont été accueillis », rassure Léa Rodier.

 

Un Made In France toujours apprécié et relayé

 

Dès lors, quel impact de ce boom immobilier premium pour l’offre française ? Dans un pays qui apprécie l’Histoire et la sophistication du paraître, le Made in France a une place déjà acquise qui s’incarne dans la présence de grands noms historiques comme Baccarat, Christofle, Bernardaud ou encore Jean-Louis Coquet. Mais aussi de designers comme Ligne Roset ou Roche Bobois. « Les hôtels et résidences secondaires en construction sont un terrain de choix pour accentuer la présence française, confirme Léa Rodier - surtout sur des segments porteurs comme les arts de la table, l’outdoor, la salle de bain ou encore la High-Tech ».

Récemment, le bureau de Business France Turquie a pu accompagner le déploiement d’acteurs dans les domaines de la cheminée haut de gamme, des radiateurs design ou de l’éclairage designé, lesquels témoignent d’une tendance grandissante pour la naturalité et la rusticité. Tous segments confondus, on recense donc des exportateurs en nombre sur le marché, qui confèrent à la France une sixième position relativement stable derrière un tiercé de tête occupé par la Chine (sur l’entrée de gamme), l’Allemagne et l’Italie (sur le haut de gamme), et un marché de 40 millions d’euros en 2020 parmi les 1,29 milliards importés par la Turquie. « Il y a encore des parts de marché à prendre, insiste Léa Rodier. Les entreprises françaises ont parfois une méconnaissance de la Turquie, notamment sur son climat économique favorable : nous les incitons à y regarder de plus près, d’autant plus que le pays agit comme hub régional ». Une opportunité pour les fournisseurs de décoration d’essaimer ainsi dans toutes les chaînes hôtelières d’Asie Centrale…

 

Un marché de prescripteurs... qui s'ouvre au digital

 

Car sur ce marché très prescriptif du haut de gamme, les architectes d’intérieur et les boutiques spécialisées occupent une place à part : si les architectes développent leurs propres showrooms et sont toujours en quête de marques originales, les chaînes de magasins spécialisées comme Bernardo, Tantitoni ou Biev offrent d’importants relais de distribution aux produits importés. « En Turquie, le poids de l’image est important : il vaut mieux trouver une boutique réputée que casser les prix », confie Léa Rodier. Au-delà de ce circuit spécialiste, les grands magasins turcs comme Beymen, Vakko Home ou Boyner constituent un circuit d’exploration bienvenu pour l’offre française. « Une délégation d’une quinzaine de prescripteurs turcs – la plus importante du salon - se rendra d’ailleurs sur le salon parisien Maison & Objets en mars prochain pour rencontrer des marques de décoration françaises », signale Léa Rodier.

Mais la tendance principale accélérée par le confinement est sans surprise l’avènement du e-commerce : « Si on s’intéresse aux chiffres cross-industries sur les trois dernières années, on constate que le e-commerce représentait 9 % des ventes en 2019, puis 15,7 % en 2020 et… 20% en 2021, cite Léa Rodier. Et parmi les secteurs-phares de cette croissance fulgurante, on retrouve la cosmétique, la mode, l’électronique et bien sûr : le segment maison et ameublement ». Un phénomène qui place la marketplace turque Trendyol parmi les champions mondiaux du e-commerce et qui fait de cette « décacorne » (plus de 10 milliards de valorisation) une marketplace quasi-inévitable pour les produits français – même s’il ne faut pas oublier les autres généralistes GittiGidiyor, N11 ou Hepsiburada.

« Enfin, un autre élément à prendre en compte pour appréhender le marché turc à l’ère d’Internet, c’est l’importance des réseaux sociaux comme prescripteurs de tendances : Instagram y établit son taux record de pénétration mondiale ! ». Impossible, donc, de faire l’impasse sur une campagne digitale appropriée et des activations de type showrooms qui peuvent ensuite donner une visibilité auprès des influenceurs. « Ce qui est intéressant, c’est de voir que coexistent ces modes de communication très récents et, à côté, des relais plus traditionnels comme le porte-à-porte, le télé-achat ou la presse spécialisée encore très consultée », mentionne Léa Rodier qui cite Maison Française, Home Art ou encore Elle Decoration.

Une chose est sûre : la sortie de crise sanitaire et le contexte macro-économique du pays créent en 2022 un terreau favorable pour explorer la Turquie. Les marques françaises déjà implantées dans le pays sont d’ailleurs à la manœuvre pour se déployer vers de nouveaux circuits et réseaux. « Il reste de la place pour de nouveaux acteurs, insiste Léa Rodier. Et les French Design Days seront l’occasion de se faire connaître à moindre coût … autant ne pas passer à côté ! »

 

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