Sur l’ensemble du territoire européen, les secteurs de l’hébergement et de la restauration ont été mis à l’arrêt pour la première fois entre mi-mars et début juin 2020. L’activité des hôteliers s’est limitée à l’accueil d’une clientèle professionnelle (routiers, personnels soignants, etc.) et celle des restaurants à la livraison et à la vente à emporter durant cette période. Une réo  uverture (souvent partielle) des établissements en juin 2020 a permis une reprise modérée, mais faute d’un véritable retour à la normale, le chiffre d’affaires de l’Horeca a connu un effondrement historique, ayant chuté de 35,5% en France en 2020. Profondément ébranlés par la crise, on estime que les professionnels du secteur français devront attendre l’année 2022 pour espérer retrouver un niveau d’activité comparable à celui du début 2020 (source : Xerfi)

La crise affecte aussi bien la restauration commerciale que la restauration collective. Selon les pays, cette dernière a repris au moins partiellement mais ne suffit pas à remonter la pente. En France, le premier confinement de 2020 a entraîné une chute de 40% du chiffre d'affaires de la restauration collective en mai par rapport à , selon l'Insee. Un coup dur pour un secteur qui avait déjà connu une perte de vitesse les années précédentes. (Source : Xerfi)

I/ Les différentes tendances européennes : état des lieux des pays d’Europe de l’Ouest

Une comparaison des différents rapports publiés par Euromonitor sur l’impact de la crise sur le secteur de la restauration hors-foyer dans plusieurs pays d’Europe de l’Ouest (France, Allemagne, Italie, Royaume-Uni, Espagne, Pays-Bas) permet de dresser des tendances globales dans la région et des aspects propres à certains pays.

La tendance la plus commune est la chute de l’activité du secteur de la restauration hors-foyer, mais son impact diffère d’un pays à l’autre : alors que l’Italie et la France ont subi une contraction de l’activité avoisinant les 33% de chiffre d’affaires, l’Allemagne s’en sort relativement mieux avec une baisse de 29,6% tandis que le Royaume-Uni et les Pays-Bas sont plus touchés (-36%) et l’Espagne a subi une chute supérieure à tous ses voisins, le secteur perdant 38,2% de chiffre d’affaires en 2020 comparé à 2019.

Pourtant, les chiffres ne disent pas tout : à titre d’exemple, selon les prévisions d’Euromonitor, l’industrie de la restauration du Royaume-Uni devrait ressentir les répercussions à long terme de la pandémie de COVID-19, dues à des difficultés structurelles avant même la crise, tandis que l’Espagne, ayant subi la contraction la plus violente de l’activité du secteur CHR, devrait vivre la reprise la plus importante sur les cinq prochaines années des pays étudiés dans cet article.

La tendance vers de nouveaux moyens de vente est généralisée : la recherche de nouveaux débouchés via la livraison et la vente à emporter s’envolent. Ces solutions, qui se développaient déjà avant la crise dans tous les pays concernés, ont pris une nouvelle proportion dans le paysage de la restauration, et il est très probable que la tendance continue dans ce sens après la crise. The Fork constate une très forte hausse, de 6 % d’établissements proposant un service de livraison avant la crise à plus de 30 % aujourd’hui, et jusqu’à 60 % pour la vente à emporter . Indépendants comme chaînes de restauration misent désormais sur cette branche notamment au travers d’investissements massifs dans les offres numériques, les services à emporter et les capacités de livraison améliorées, tel est le cas notamment en Italie d’après une étude d’Euromonitor sur le secteur italien.

Deuxième tendance générale : les chaînes de restauration ont bien mieux résisté à la crise, certaines ayant gagné des parts de marché (notamment aux Pays-Bas pour les institutions comme McDonald’s Nederland ou Domino’s Pizza), et ont su s’adapter très rapidement grâce à leur structure favorisant la livraison en masse. A l’inverse, les restaurateurs indépendants ont subi la crise de plein fouet et s’en sortent moins bien : de nombreux établissements ont dû fermer leurs portes, accentuant une tendance observée avant la crise (notamment en France ou au Royaume-Uni).

Si ces deux tendances sont communes à l’Europe occidentale, chaque pays vit la crise différemment, les conséquences économiques se distinguant par les caractéristiques propres à chaque secteur nationalement.

Le poids de l’aide gouvernementale fut hétérogène selon les pays : particulièrement conséquente en France et en Allemagne, elle a permis de sauver de nombreux restaurateurs dans ces pays. 

Par ailleurs, en Allemagne, les professionnels surmontent mieux la crise, et l’écart entre la situation des chaînes de restauration et celle des indépendants est moindre : la pénétration du marché par les chaînes étant relativement faible dans le pays (dans une comparaison avec les pays voisins), leur réponse à la pandémie a eu un impact limité sur le marché dans son ensemble et n’a pas autant creusé l’écart vis-à-vis des indépendants que ce qui a pu s’observer dans d’autres pays d’Europe de l’Ouest.

Au Royaume-Uni, on assiste à l’aggravation d’une crise qui touchait la restauration dès avant la Covid-19, notamment dans les centres-villes où les loyers étaient devenus trop coûteux, accentuant la fuite des restaurateurs des centres-villes, alors que les fermetures se faisaient de plus en plus nombreuses déjà avant 2019.

C’est peut-être vers l’Espagne qu’il faut se tourner pour envisager un avenir à la relance : les Espagnols ayant une longue tradition de sortir et de se restaurer hors de chez eux, une belle reprise se dessine et semble se confirmer par les chiffres établis par les prévisions d’Euromonitor, tablant sur une augmentation de 25,7% entre les exercices 2020 et 2021, si la situation se stabilise.

(Source : Euromonitor)

                                                                      

   II/ La relative résilience face à la crise et la croissance tendancielle du secteur laissent présager une belle reprise

Il faut cependant regarder au-delà de la conjoncture défavorable pour s’apercevoir que, d’un point de vue structurel, les perspectives de la restauration hors-foyer sont rassurantes. C’est la conclusion à laquelle arrivent diverses études.

Ces études font état d’une vraie résilience du secteur. La plateforme de réservation en ligne The Fork a analysé les résultats de la restauration en Europe et tire le bilan de l’année 2020, constatant que l’industrie reste solide et tient bon face à la crise. Après un an de crise sanitaire, les observations sur l’état de l’industrie de la restauration en Europe mettent en évidence une résistance du secteur, notamment lors du rebond à l’été 2020 qui a permis de rehausser les chiffres sans pour autant atteindre le niveau de l’été 2019 (-24 % en juillet, -18 % en août). Sur cette même période, les zones touristiques saisonnières en profitent davantage que l’ensemble des capitales européennes qui ont accusé une baisse moyenne de fréquentation des établissements de -39 %. L’absence de la clientèle étrangère a certes manqué en valeur, mais le nombre de couverts observé suggère que la population locale a plus massivement que d’habitude contribué à remplir les restaurants.

 

Par ailleurs, l’étude note pour l’instant que la proportion des résiliations de contrats dues à des raisons financières ou pour fermeture définitive reste stable (+1,9 point). Les entreprises françaises s’en sortent pour l’instant mieux que leurs voisines européennes : seuls 10 % des restaurateurs disent avoir eu recours à des licenciements dans leurs équipes en France, contre 24 % en Italie.

 

Cette résilience de la restauration française donne en partie raison à certaines projections optimistes d’avant crise, comme celle de l’institut d’études économiques Xerfi, qui présentait un scénario prévisionnel très favorable pour la restauration avec un taux de croissance annuel moyen estimé à 2,6% pour toutes les filières de la restauration sur les 5 prochaines années. (Source : Etude La ténacité du secteur en France est à mettre en relation avec l’attachement de la population à cette forme de consommation, qui représente plus d’un quart du budget alimentaire des ménages en 2018 : le résultat d’une hausse substantielle de la part de la restauration hors domicile, qui passe de 14 % en 1959 à 28 % en 2018. (Source : FranceAgrimer – Gira Foodservice)

La solidité du secteur semble être structurelle et devrait permettre une reprise de sa croissance naturelle après une crise conjoncturelle.

                                                     

Pour conclure, face à cette crise conjoncturelle qui fut une onde de choc pour tout le secteur et a entraîné une chute du chiffre d’affaires sans précédent dans tous les pays d’Europe de l’Ouest, des conséquences structurelles sont en train d’émerger, notamment la révolution de la restauration à emporter ou le recul des indépendants face aux chaînes de restauration qui sortent relativement renforcées de cette crise.

Néanmoins, la résilience du secteur ainsi que son adaptabilité face à cette crise nous montrent que les professionnels sont prêts pour la relance. Cette relance devrait être stimulée par l’engouement populaire du retour à la normale notamment dans les pays dans lesquels la restauration hors-foyer est culturellement enracinée, à l’exemple de l’Espagne qui s’attend à une relance plus que positive.

Sans pour autant rattraper la contraction économique du secteur depuis début 2020, qui nécessitera 2 à 5 ans selon les pays d’après les prévisions d’Euromonitor, la reprise économique du secteur semble partie pour être historique, elle aussi. 

 

Sources : Xerfi, Euromonitor, The Fork, FranceAgriMer

 

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