Vu de l’Occident, la Chine et son écosystème tech s’apparentent encore trop souvent à un Orient mystérieux, dont les opportunités le disputent aux risques. La distance, la langue, les profondes différences culturelles et, il faut bien le dire, une forme de méfiance, faussent la perception de l’Empire du Milieu et de la vitalité de son écosystème tech. La tech chinoise, encore très tournée vers son marché intérieur, à l’exception de quelques grands noms (Huawei, Alibaba, Tencent…), ne facilite pas la compréhension des enjeux de ce marché extrêmement dynamique et ouvert.

Aujourd’hui, pour une startup française, ignorer par principe la Chine et ses acteurs est une erreur ! Aborder ce (très) grand marché n’est pas pour autant facile, et doit être minutieusement préparé. Plusieurs idées reçues doivent être battues en brèche et il est nécessaire de mettre en perspective le ratio opportunités / risques réel de la tech chinoise.

1. La Chine n’est pas innovante !

Idée reçue, communément partagée, et alimentée au fil des ans : la Chine est perçue comme plus encline à la copie qu’à la création. Qui sait pourtant qu’il existe plus de 7000 incubateurs en Chine, qui ont donné naissance à des centaines de milliers de startups ? Que 8000 fonds privés ont investi plus de 30 milliards de dollars dans les startups en 2015 en Chine ? De très nombreux acteurs américains et européens viennent désormais en Chine pour identifier ses sources d’innovations, parfois avec l’ambition d’y investir. En quelques années, les innovations chinoises en matière de réseaux sociaux mobiles, à l’image de WeChat, ont développé de nouveaux modèles commerciaux numériques en lien avec les galaxies de e-services portés par Alibaba ou Jd.Com. Connaissez-vous les noms des 100 premières licornes chinoises, de Face++, à Iflytech, en passant par Xiaomi qui ouvre à Paris ? Connaître la Tech Chinoise aujourd’hui, c’est s’assurer de faire les bons choix demain.

2. La Chine ne respecte pas la propriété intellectuelle !

Progressivement, la Chine s’est attachée à la fois à reconnaître le concept, et s’est efforcée à mettre en œuvre des mesures pour répondre aux nombreuses demandes de ses partenaires. Néanmoins, il est fortement probable que les acteurs chinois perçoivent une technologie peu ou mal protégée comme un actif à prendre. Le marché chinois est très compétitif, et révélateur de ces failles de protection de la propriété intellectuelle. Avant de venir en Chine, il est important de se demander ce qui est réellement détenu par l’entreprise pour l’exporter, quitte à conserver dans son écosystème traditionnel ce qui ne peut être localisé en Chine. C’est vrai des atouts technologiques, de la puissance d’investissement, de l’envie et de la motivation des talents, de la qualité et de la densité des liens avec ses partenaires locaux chinois.

3. La culture des affaires me sera difficile à appréhender !

Dans le monde des startups, la Chine n’occupe pas le peloton de tête des écosystèmes les plus attractifs. Penser en ces termes, c’est se couper d’un grand courant d’innovation, d’un grand marché, mais aussi d’un réseau de nouveaux entrepreneurs. Ces nouveaux visages de la tech chinoise décident de rencontres et proposent du networking à la dernière minute, pour valoriser ceux qui sont présents ou disponibles dans leur écosystème, pour construire leur réseau et les opportunités au jour le jour. La priorité est donnée à ceux qui se trouvent sur place ! Cette erreur, trop de startups françaises la font. Beaucoup d’histoires seraient positives, si davantage d’informaticiens français, et de geek, venaient travailler en Chine. L’effervescence du réseau French Tech en Chine montre que les Français y ont toute leur place et peuvent partager une qualité de vie méconnue. Ambitieux, venez ! car grâce à votre background occidental, vous aurez la chance de rencontrer un niveau de décideurs élevé qui valoriseront votre profil ! Vous aurez des responsabilités et des missions, comme nulle part ailleurs. La Chine, c’est votre accélérateur de business.

4. En Chine, il est impossible de réussir !

C’est tout simplement faux ! De nombreux entrepreneurs français réussissent, car ils ont su gagner la confiance d’acteurs locaux, mais aussi, et de plus en plus, grâce à des partenaires étrangers qui les soutiennent dans leur financement. Il est vrai que les « success stories » ou les « role models » ne sont pas suffisamment mis en avant. Cela tient à différentes raisons, parmi lesquelles le souci de ne pas donner d’idées à la concurrence. En revanche, ces réussites sont presque toujours accompagnées de partenariat avec des acteurs chinois. Persévérance, motivation, empathie et implication personnelle sont nécessaires et font la différence. En contrepartie, les champs d’innovations ou d’opportunités sont à la taille du marché : Silver economy, Assurtech, Fintech, semiconducteurs…

5. La Chine c’est bon marché !

Cette dernière idée reçue peut s’avérer périlleuse. Tant les talents que l’immobilier de bureaux, sont rentrés dans les standards européens, et les dépassent parfois. Sous-estimer le coût de son personnel, et surtout des progressions salariales, peut sérieusement remettre en question la stratégie de développement. Les bons collaborateurs coûtent cher et comparent régulièrement leur salaire. Avant de venir, mieux vaut mettre l’accent sur le budget à prévoir en matière de RH, car in fine, avec un produit compétitif, disposer d’une force commerciale nombreuse peut être la clé du succès. La Chine aide à penser grand.

La Chine a trop longtemps été considérée comme un concurrent. Il est plus que temps de la percevoir comme un partenaire. Les acteurs français et européens qui ont su dépasser cette vision surannée ont pris une longueur d’avance sur le marché.

La Chine souhaite recourir à de plus en plus la Tech étrangère protégée et localisée. Elle constitue un tremplin incomparable pour les affaires, et est ouverte aux talents qui se donnent les moyens de leur audace. C’est une chance pour les startups, à condition de s’y préparer.

Thomas Vial

Directeur du département Tech & Services

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