« On ne fait pas d’export sans une banque ». Depuis quinze ans que Jean-Luc Estrade travaille sur ces sujets au sein du groupe Crédit Agricole, c’est le message qu’il martèle aux PME et ETI tentées par l’aventure. « À tout instant dans votre projet, vous serez confrontés à une problématique bancaire : dans quelle monnaie établir mon devis ? quelle échéance de paiement négocier auprès de mes prospects ? quel type de prêt solliciter pour ma nouvelle ligne de production ? »… 

Ces situations, Jean-Luc Estrade les a vécues lui-même pendant dix ans, quand il accompagnait sur le terrain les entreprises installées au Portugal puis en Amérique Latine. Depuis, il a rejoint le pôle d’accompagnement international du siège du groupe Crédit Agricole et, entre autres missions, il distille la bonne parole sur le rôle crucial des banques au cours d’un projet export: « Nous faisons partie intégrante de la team France Export », confirme-t-il.

 

Alors pour illustrer son propos, quoi de mieux qu’une preuve par l’exemple ?

Jean-Luc Estrade partage trois contextes-types qui nécessitent grandement l’avis d’une banque.

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LE CONTEXTE « SIGNATURE D’UN NOUVEAU CLIENT ÉTRANGER »

Quand une entreprise cherche à effectuer une vente à l’export, elle est souvent confrontée à quatre grandes problématiques financières : les risques de change, les délais d’encaissement, les coûts de la transaction bancaire et la sécurisation du paiement.

 « Connaître le pays cible et ses pratiques de règlement est dès lors indispensable. Avoir des équipes sur le terrain nous renseigne sur les attentes des locaux, en complément de l’évaluation des risques pays macro effectuée à Paris », signale Jean-Luc Estrade, qui cite en exemple le secteur public italien réputé « payeur longue durée », ou les entreprises indiennes qui affichent une préférence pour les paiements en dollars américains – bien souvent avec délais.

 « L’intérêt de cette connaissance pour l’exportateur, c’est qu’elle peut le conduire à intégrer ces déterminants bancaires directement dans sa négociation et se rendre ainsi plus compétitif. Par exemple, pour éviter de se couper d’un marché en demandant un paiement comptant, nous pouvons construire des offres de financement intégrant une assurance-crédit et une avance de trésorerie : elles permettront à l’exportateur d’accepter un règlement à trois mois par exemple ».

Autre situation assez fréquente : lorsque l’acheteur étranger souhaite acquérir des marchandises ou équipements vendus par l’exportateur, mais qu’il souhaite repousser son règlement pour correspondre au retour sur investissement de ces biens. La banque est alors en mesure de proposer des formules incluant une avance totale de trésorerie, avec des paiements étalés sur une ou plusieurs années et une sécurité garantie par des crédits documentaires confirmés ou des assurances crédit.

 L’essentiel, comme le signale Jean-Luc Estrade, c’est que tout le monde soit gagnant : l’exportateur qui n’aura pas à obérer sa trésorerie et dont la créance sera sécurisée, et l’importateur étranger qui aura trouvé une solution de financement souvent moins onéreuse qu’auprès des banques de son pays. 

 

LE CONTEXTE « PROJET D’INVESTISSEMENTS OU DE DÉPENSES »

Quand il s’agit d’export, la notion de financement de projet peut recouvrir différentes formes, qu’il s’agisse de projets d’investissements matériels – comme par exemple, la création d’une nouvelle ligne de fabrication dédiée à un pays cible – ou de dépenses immatérielles – comme par exemple le coût d’embauche d’un directeur export, les frais de déplacement de l’entrepreneur dans le pays, ou la participation à un salon professionnel (et plus globalement les frais marketing).

 « Sur ce type de situations, la banque peut vous proposer plusieurs types d’outils, précise Jean-Luc Estrade. Mais, même pour un projet court/moyen terme, je recommanderai toujours une discussion de fond sur la stratégie de l’entreprise à deux ou trois ans dans le pays : préparer un business plan permet d’anticiper les futures dépenses et les ambitions de vente ; et pour l’établissement bancaire, cela renforce la capacité de proposition dans la durée, incluant le délai nécessaire pour le retour sur investissement.   

 De fait, trois types d’accompagnement se présentent : le prêt pur et simple, à court, moyen ou long terme, mais aussi l’intervention au capital de la société ou encore le fléchage vers les outils publics. « L’intervention au capital de la société, à vocation minoritaire, nous pouvons le proposer quand l’entreprise risque de déséquilibrer sa trésorerie et de s’endetter trop lourdement par rapport à ses fonds propres, explique Jean-Luc Estrade. Cela peut être le cas avec un rachat d’entreprise locale par exemple : notre participation permet alors de muscler financièrement l’entreprise sans la pression de l’endettement ».

 Quant au fléchage sur les outils publics (assurance prospection et prêt croissance international de Bpifrance notamment), il s’agit surtout d’articuler les différents dispositifs entre eux : « Très souvent, les entreprises ont entendu parler des dispositifs, mais elles ne savent pas comment les assembler. Nous avons un grand rôle d’acculturation à jouer là-dessus ».

 

LE CONTEXTE « IMPLANTATION D’UN BUREAU A L’ÉTRANGER »

Ça y est, la décision est prise : vous ouvrez votre premier établissement à l’étranger. Les premières démarches bancaires vous amènent alors à une question-clé : assurer le financement de vos projets depuis votre banque française ou opter pour une banque en local ?

 « Forcément il y a plusieurs éléments qui entrent en ligne de compte : les taux d’intérêt et marges bancaires bien sûr – qui peuvent varier très fortement d’un pays à l’autre – mais aussi le risque de change, détaille Jean-Luc Estrade. Au Brésil par exemple, les conséquences de la réglementation des changes et de la fiscalité locale doivent être bien appréhendées avant d’envisager des financements octroyés par la maison-mère française à sa filiale brésilienne… et si le real baisse, cela renchérit d’autant plus le coût du financement ».

 Dans cette optique, les relations entre établissements internationaux deviennent un avantage comparatif important : négociation de garanties entre banque de la filiale et banque de la maison-mère, gestion des flux de trésorerie d’un pays à l’autre, circulation de l’information sur les comptes… Plus la banque « filiale » est connue voire intégrée au sein de la banque « mère », plus les échanges sont facilités. « Les banques françaises disposent historiquement d’une bonne présence à l’étranger ce qui peut permettre à une entreprise exportatrice de rester dans le giron de la même banque. En ce qui concerne le Crédit Agricole, nous sommes présents dans cinquante pays ; et pour les pays où nous ne sommes pas présents, nous avons des accords avec des banques partenaires pour garantir ces fameux services ».

 

EN CONCLUSION…

Véritable réseau de terrain, les banques font bel et bien partie de la communauté de l’export. « On a beaucoup de collègues qui sont devenus conseillers du commerce extérieur », s’amuse Jean-Luc Estrade. Son groupe a déjà accompagné des milliers d’entreprises sur ces questions-clé et il met à profit toute son expérience à l’étranger pour conseiller les nouveaux clients. « J’ai en tête beaucoup de dirigeants d’entreprises qui prennent le temps de venir nous rencontrer et se déplacer avec nous dans le pays pour prendre en compte tous les facteurs économiques. Notre rôle alors, c’est de pointer les risques et de leur conseiller les outils adéquats pour les limiter ». Avant de conclure : « Le banquier qui tient ce discours, il va forcément être écouté… »

 

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